Le « Sanglier rieur » était une de ces nombreuses auberges un peu glauques qu’on trouvait sur les quais d’Avalon. La patronne était une beathach sanglier à l’air désagréable et ayant eu la main un peu lourde sur le maquillage. Elle était occupée à jouer aux dames avec quelques uns des clients douteux. En même temps, cela ne l’empêchait pas d’hurler à intervalles réguliers sur ses employés qui faisaient de leur mieux en l’observant d’un air terrifié. La clientèle était connue pour être essentiellement des pirates et corsaires qui écumaient la mer Sylve. Beaucoup racontaient leurs derniers pillages de navires Malaqii. Cependant, un peu au fond de la taverne, un petit groupe restaient pour le moment entre eux, dans le silence, se contentant d’écouter. Dan et ses hommes en profitaient pour en apprendre d’avantage sur les pirates et leurs diverses stratégies. Voilà qu’ils se mettaient à parler d’un capitaine d’équipage, un beathach loup qui était sans pitié face aux marchands Malaqii et savait cibler les brebis faibles du troupeau comme il aimait à dire. Et cela lui avait permis de nombreux pillages couronnés de succès. Pourtant, Dan était étonnamment serein.

Quand on parlait du loup, voilà que ce dernier osait enfin pointer le bout de son museau, sans mauvais jeu de mots. Mais l’homme-bête et son équipage semblaient tous penauds et avaient d’avantage des têtes de vaincu. Le capitaine se distinguait aisément de ses hommes, pas seulement en étant le seul Beathach, mais aussi en ayant une tenue bien plus élaborée, bien qu’abîmée suite à un malencontreux évènement. Parmi les clients, certains semblaient également surpris par la présence du capitaine lupin dont on disait qu’il n’était e genre à traîner dans ce genre de troquet. Aussitôt, d’autres clients leur demandèrent ce qu’il s’était passé.

- Faites gaffe, il y a un marchand, son rafiot paye pas de mine et quand j’ai voulu faire manœuvrer mon navire pour le combat, il ne répondait plus, et on a finit à la portée de leurs canons. Et pire, ils nous ont pillé. Un peu plus tard, on a vu qu’on a saboté le gouvernail.

Des murmures inquiets fusèrent chez les pirates. Le loup balaya la salle jusqu’à se raidir quand il remarqua Dan et les siens en train de manger tranquillement.

- Qu’est-ce qu’il fait là ?!

Tous se tournèrent vers Dan et son groupe. Le cobe soupira. Autour de lui, les pirates avaient bien compris qu’il n’était pas des leurs et qu’il était responsable de l’échec du loup.

- On peut même pas prendre notre repas tranquillement…

Quelques instants plus tard, Sembu et ceux qui étaient restés au Selénidore, comprenaient rapidement qu’une bagarre avait éclaté dans la taverne en voyant Dan et sa bande un peu cabossés, mais visiblement victorieux. Le koudou discutait avec un bourgeois qui se montra un peu décontenancé en voyant ceux qui se présentaient devant-lui. A la tête de ce groupe, un cobe torse nu vêtu d’un simple pantalon de style Malaqii qui avait souffert suite à la bagarre. Dan avait également un œil au beurre noir.

- C’est votre équipage ?! Vous devriez le tenir.

Sembu croisa les bras.

- Je suis désolé, je suis pas le capitaine de ce navire.
- Alors c’est qui ?

Le cobe à la tête du groupe revenant de son échauffourée s’avança.

- C’est moi ! Désolé, disons qu’on a eu à gérer quelques pirates un peu rancuniers…

Sembu se tourna de nouveau vers le bourgeois un peu surpris.

- Si vous voulez des produits venus d’Al’Malaq, les pirates, on en fait notre affaire, notre navire a jusqu’à maintenant réussi à s’en tirer.
- Ouais, c’était plutôt les pirates qui avaient du soucis à se faire.

Ce que Dan oubliait de dire, c’était qu’il lui arrivait de faire prendre la fuite à son navire quand l’adversaire en face était un peu trop coriace. Heureusement que le Selénidore était très rapide.

Les demandes du clients furent notées, Dan avait besoin d’argent. Entre les salaires de son équipage et l’entretien du navire, forcément, les factures pouvaient-être salées. Sans parler des éventuels dédommagements pour les taverniers ayant subi des dégâts matériels.

Dan et sa fine équipe allaient bientôt partir. Mais les derniers préparatifs laissaient encore le temps à un passager d’éventuellement venir à bord. Et le cobe n’allait pas refuser une nouvelle rentrée d’argent.