La tension était à son paroxysme, rien ne devait être laissé au hasard. Tout devait être parfait pour montrer à Arathia tout entière la bienveillance de Clara Nocte envers les autres royaumes : les frontières, ouvertes et accueillantes, se montraient bien plus laxistes pour permettre aux curieux de participer au 307e anniversaire de la purge de Noctis Tempore. Enfin, peut-on réellement parler d'un anniversaire bienfaiteur lorsque Clara Nocte était lui-même responsable de cet événement sanglant ? Certains avaient des doutes, mais qu'importe, ce débat n'était pas à l'ordre du jour.

Le barrage d'argent n'avait jamais été aussi actif, tout le monde était sur les chapeaux de roues, les soldats s'activaient, vérifiant l'identité des personnes passant le barrage depuis Ananda pour se rendre à Munditia : hors de question de faire une erreur et de laisser passer des maudits ou d'autres atrocités sans nom. Les vérifications étaient parfois poussées, voire même discriminantes, pour éviter toute tragédie. L'Inquisition, quant à elle, était chargée de faire le lien entre les différents points d'arrivée et la grande capitale elfique, pour vérifier que tout se passait dans les règles et que personne ne rencontrait de problèmes pendant sa traversée du royaume.

Nombreuses étaient les diligences tirées par des Arolins pour mener les curieux à bon port, tandis que l'Inquisition avait établi un campement de fortune près du village bordant les immenses champs d'argent recouvrant une partie du territoire.

Aurélia, cette fois-ci, c'était Klein qui te suivait de près. Hors de question pour l'Ouroboros de te lâcher d'une semelle, de peur que tu ne fasses encore des folies. Tu te devais d'être présentable aujourd'hui, tu avais un rôle important à jouer, même si tu étais persuadée d'être la seule élue. Klein devait veiller à ce que tout se passe pour le mieux. Cette fois, pas le temps de compter tes liges trop longtemps : l'orgueil est vif comme l'éclair !

Vous vous étiez arrêtés près du village natal de la jeune elfe quand une explosion fit trembler le sol jusqu'à votre position. D'un regard commun, vous comprenez en vous retournant vivement vers le barrage d'argent. Une fumée noire s'en dégage, signe qu'une attaque venait tout juste d'avoir lieu. Des hurlements indescriptibles se firent entendre, résonnant sans problème jusqu'à vous, alors qu'un mouvement de foule alerte les membres de l'Inquisition, pris de court.

Des bruits de talons se font entendre, et une femme se détache de la foule, attirant possiblement votre attention avec ses deux prothèses métalliques remplaçant ses jambes. Les yeux clos, elle semble étonnamment sereine et échappe un soupir en levant un grand encensoir, déversant une brume à l'odeur réconfortante.

« Dame Aurélia, élue de l'orgueil. Klein Moretti, cœur de soufre, accepteriez-vous de vous battre à nos côtés pour protéger nos terres de la gangrène qui cherche à nous atteindre ? » Sa voix chante presque, elle est belle, élégante, ses yeux bleus jaugent pour faire chavirer vos cœurs. « Je suis Dulcia Sanctia, représentante sainte du grand évêque de Munditia. Je serais votre bénédiction face à la corruption grandissante. » Elle étire un sourire avant de presser le pas en direction du barrage. « Hâtons-nous, avant qu'il ne soit trop tard. »

Les minutes passent alors que Sanctia vous regarde, le regard empli de désapprobation. Elle n’est pas ici pour rire, même lorsqu’Aurelia dévoile sans même s’en rendre compte son niveau d’intelligence et que Klein termine à genoux devant elle pour sa déclaration aussi grotesque que désespérée.

« Nous n’aimons que la Lune, cœur de soufre. Vous ne le saviez pas ? » Elle rit doucement, éclatante, en venant poser sa main libre sur la tête de l’homme dans un geste presque maternel. « Dame Aurelia, ne sous estimez pas la corruption. Vous avez beau resplendire d’une aura particulière, vous pourriez sombrer dans les ténèbres sans même vous en rendre compte. »

Relevant la tête, le cri effroyable d’une créature qu’on pensait disparue survola le champ d’argent, assombrissant les lieux pourtant éclairés par la lune protectrice. Les cris des pauvres innocents couvrent les bruits d’explosions retentissant encore du barrage alors qu’ils tentaient de fuir l’immense créature se posant à plusieurs mètres de vous, faisant trembler le sol sous vos pieds. Sanctia ne bouge pas, observant les deux autres silhouettes s’avançant pour accompagner le dragon se tenant en face de vous. Elle hésite, vous observe en levant son encensoir d’où sortait une brume de plus en plus épaisse.

« Nous sous estimez pas vos adversaires ou ils ne feront qu’une bouchée de votre âme. »

Vous sentez votre âme apaisée malgré toute la tension dévorant les lieux. Vous êtes enivrés, même toi Aurélia, comme si Dulcia était capable de toucher jusqu’à ton âme corrompue. Peut-être étais-ce parce que, toi-même, tu n’étais pas consciente de cette corruption touchant ton être ? Qu’importe, vous aviez en face de vous plus que des simples ennemis.

Plus que des simples créatures impies.

Qui aurait cru, qu’en cette journée festive, vous tomberiez nez à nez avec la dirigeante, la créature de la Tour Galate, et deux de ses plus proches fidèles ?

« Vous ne tomberez pas, j’ai prêté serment à la Lune de vous protéger au péril de ma vie. Ayez foi et tout ira bien. »

Les yeux clos, Dulcia ne prit même pas la peine d’observer les trois archidiacres face à elle. Elle vous savait puissants mais à son sourire tendre, elle ne semblait pas inquiète quant à l'issue de cette bataille. A la remarque d’Isolde elle hausse les épaules, l’air de rien avant de poser délicatement sa main libre sur l’épaule d’Aurélia. « Dame Isolde, permettez-moi de vous dire que je ne crains pas vos menaces. Vous avez une armée, nous avons l’élue de Clara Nocte. » De quoi gonfler l’égo de la jeune elfe. Elle la sait capable de grandes choses et surtout elle sait le magicien à ses côtés en mesure de la protéger.

Observant de nouveau le monde, elle vous jauge tous, Aurélia fonçant vers Isolde, Klein invoquant … Biscotte, un tigre impressionnant au nom ayant le mérite d’étirer un sourire amusé à la religieuse mécanique - au moins si tu ne gagnes pas la guerre Klein tu auras eu le mérite de faire sourire la dame.

« Faites attention aux morts ! Je surveille vos arrières, je saurais soigner vos maux les plus douloureux ! » Comprenez que Dulcia ne vous abandonnera pas, à la moindre blessure elle répliquera, pour vous permettre de vous relever sans crainte.