Percy mon amour,

Ta lettre a égayée ma journée, je n'ai même pas pu prendre l'air dans nos jardins. Les nuages ont pleuré ton absence, ils ont certainement senti comme je me languis de ta présence dans les murs du château. J'aurais aimé pouvoir te suivre mais comme tu dis, je ne suis pas certaine que tout le monde aurait apprécié.

Tu me raconteras tes aventures sur les mers, nous auront tout le temps qu'il nous faut. Aujourd'hui ou hier n'ont pas d'importance, c'est vers demain que nous devons nous tourner. Et qu'importe ce qu'il se passe en dehors des terres, un jour je suis certaine qu'ils verront ce que nous faisons pour Arathia.

En parlant de père et mère, ils sont distants ces derniers temps. Je met tout ça sur le compte de l'émotion de voir leur fille reine. Mais il y a une chose me chiffonne, ils taisent un secret je le sens. Et comme tu le sais, je déteste ne pas savoir ce qu'il se trame derrière mon dos, crois moi je vais trouver ce qu'ils cachent.

Pendant que je t'écris ces derniers mots, le ciel se dégage. Je vais pouvoir sortir dans les allées fleuries, elles me rappellent ton doux visage. Les boutons mouillés des roses jaunes sont particulièrement adorables. Je me remettrais au travail ensuite, les missives sont plus nombreuses depuis que tu es parti.

Avec toute ma tendresse,

Ô mon roi,

Ne t'en fais pas j'ai déjà un petit réseau de personne que je considère comme de bons espions. Je ne t'en parle pas dans cette lettre car on ne sait jamais, elle pourrait être lue par n'importe qui. Je suis tout proche de découvrir ce qu'ils cachent. Et pourtant, plus je me rapproche, plus j'ai peur de ce que je découvre.

Merci pour ta confiance, je suis certaine qu'à deux nous sommes plus forts que n'importe quelle puissance. Ils n'imaginent pas que notre amour est ce qui nous rend invincibles. Tu verras Percy, nous serons une nation toute puissante. Tu remplaces mes lacunes et inversement, a deux nous n'avons aucun défaut.

Rien ne nous séparera, je te le promet.

Je suis désolée de devoir déjà te laisser avec seulement quelques mots mais je dois déjà y retourner.

Avec toute ma tendresse,

Pandora n'a pas eu le temps de répondre à sa missive écourtée. La reine a eu bien plus de choses à s'occuper, des nuits sans trouver le sommeil à écrire ou convoquer certaines personnes ... Elle n'aurait jamais voulu découvrir ce secret. Ca l'a rendu malade pendant des jours et même encore aujourd'hui alors que le petit caillou annonçant le retour de son aimé, son estomac n'a pas pu avaler grand chose. Cachant ses yeux cernés sous la poudre et la pâleur de sa peau par un peu de rouge, elle prend son courage à deux mains et se met en route en suivant l'invocation de Perceval. Empruntant les couloirs froids, sa peau se couvre de frissons. Fraîcheur ou peur ? Un peu des deux certainement. Car ce qu'elle vient de découvrir est lourd de conséquence. Pour elle, mais surtout pour Percy. La rancœur et la colère on laissé place à la tristesse de devoir annoncer ça elle même. Yeux dans les yeux.

Et pourtant, c'est presque en se cachant qu'elle entre dans la chapelle. Priant les dieux de lui donner du courage, elle ne s'approche tout d'abord pas de lui. Pourtant il lui a ô combien manqué, sa haleur et son odeur. Mais comme pour se punir elle préfère rester loin et le saluer comme elle aurait salué devant tout les convives. Pliant les genoux et relevant les pans de sa robe, elle se penche bien plus bas qu'à son habitude.

— Arvandor est heureuse de voir son bien aimé roi revenir sur ses terres.

Et Pandora reste figée, les articulations gelées mais ses yeux secs de toute pluie. Il faut dire qu'elle n'a jamais été très émotive, ou tout du moins à montrer ses émotions. Seulement, c'est le cœur lourd qu'elle retrouve son amour, incapable de regarder ses cheveux blonds et ses yeux doux qui lui donnent cet air adorable, qu'il n'offre qu'à elle.

La reine se laisse approcher, se laisse toucher. Semblant prendre un peu de sa chaleur, elle se laisse aller tout contre lui. Prend appui sur lui comme il prend appui sur elle. En ce moment, tout est harmonie. Mais une dissonance dans l'air la rappelle à elle, Pandora soupire légèrement, seul trace de son émotion. Enfin, elle vient poser sa main sur sa nuque, à la base de ses cheveux et vient masser ses muscles fatigués par le voyage.

— Percy ...

Le cœur serré, elle promène son regard dans la chapelle comme si un signe pouvait lui être envoyé. Un signe ou une idée de comment lui annoncer. Comment lui dire. Mais elle ne peut pas, ne veut pas lui apporter ce chagrin alors que la blessure, elle le sait doit être encore saignante. Les épaules basses, elle inspire pour se donner contenance, pour se donner du courage. Il faudra lui en parler, mais peut-être qu'elle pourrait se laisser le temps ...?

— Percy. Tu m'as tellement manqué toi aussi. Le château n'est rien sans toi. Et moi encore moins.

Elle se recule un peu, vient caresser sa joue de son pouce avec l'air tendre qu'elle n'affiche que pour lui. Oh comme elle regrette de savoir ce lourd secret, comme elle pleure son chagrin au fond de son cœur. Alors pour une fois c'est elle qui fait le premier pas, vient déposer ses lèvres contre les siennes. Repoussant tout les désagréments et les malheurs pour l'instant et se fondre en lui. Laisser l'amour l'habiller et lui rendre son habit de femme, abandonnant le vêtement de reine aux jours plus sombres.

Eh bien voilà que la dame d'Arvandor perd ses moyens. Le temps d'un instant seulement, mais elle doit faire un pas en arrière en hochant la tête. Avec tout ce qui se bouscule dans son esprit, elle s'est peut-être un peu trop laissée aller à ses sentiments. Ce qui n'est certainement pas digne de la reine. Alors elle reprend doucement possession de son corps, se recoiffe en reprenant une position droite puis prend la main de son roi entre ses deux mains.

— Tu as raison, je ne sais pas ce qu'il m'a prit, excuse-moi. Il faut croire que ton absence m'a bien plus affectée que je ne le pensais.

Elle évite de dire ce qu'elle a vraiment sur le cœur. Elle inspire un bon coup pour reprendre contenance. Il n'y a pas d'urgence, maintenant qu'il est là, elle pourra le lui dire n'importe quand. Mais ce moment n'est pas encore arrivé. Elle est capable de le prendre pour elle, d'adapter ses actions pour éviter de l'impliquer. Demain sera un meilleur jour, n'est-ce pas ?

— Perceval.

Son nom est prononcé avec douceur et tendresse, la dame frotte sa paume sur le dessus de la main du roi. Sous ses airs froids, il reste toujours un peu de chaleur pour l'homme de son cœur. Même lorsqu'il saigne pour une quelconque raison, elle reste sa dame.

Pandora met de côté tout ce qui la tracasse. Son roi est là pour elle, quoi qu'il arrive il sera toujours temps de lui en parler plus tard. Rien ne presse, elle a déjà fait ce qui était nécessaire pour que le château garde le calme. Personne ne pourra interrompre leur retrouvailles.

— Rentrons alors. Tout peut attendre.

Pourtant au fond d'elle, la reine se morfond. Elle tape du pied alors que le sens du devoir aurait dû être supérieur au désir de se retrouver seule à seul avec son mari. Mais la brune, femme avant d'être reine ne souhaite pas avoir cette discussion avec lui. Parce qu'elle sait que ça va lui faire beaucoup de mal, qu'il va certainement douter d'elle. Peut-être. Et c'est ce doute qui prédomine tout.

— Je le sais Percy. J'espère que tu sais que moi aussi. Au delà de notre devoir, je t'ai choisis pour ce que tu es.

La reine caresse la joue de son roi alors que le remord lui tord les entrailles. Mais elle arrive à lui sourire comme si de rien n'était. Son amour est tel qu'elle peut mettre de côté ses doutes et ses craintes. Après tout ne se sont-ils pas choisis mutuellement ?