L’homme ne ris pas. Toi non plus. Le craquement du bois rencontrant la lame attire ton attention, tes yeux se rivant dessus. Tu ne fais rien de plus, imperturbable, plus agacée par son comportement et ses gestes qu’autre chose. « Dites moi plutôt votre vrai prénom, sombre idiot. » Tes dents claquent, pour répondre à son sifflement, alors qu’il touche ta peau. Ça t’arrache un frisson de dégoût, ton visage d’un naturel si calme se déformant en un rictus mauvais. « Je vous interdit de me toucher de vos sales pattes. »

Tu ne peux chasser sa main, prisonnière de ton emprise avant de sentir ton équilibre te faire défaut. Chutant à genoux au sol, tu perds petit à petit patience. Tu refuses de perdre la face devant lui, ta lame fermement serrée entre tes doigts. Tu pourrais te laisser aller à la violence, te jeter sur lui, lécher sa peau du métal froid de ton arme mais tu sais que la bête ne se laissera pas faire. Tu n’es pas stupide, et sa manière de te provoquer te force à vouloir lui répondre.

Quitte à jouer à un jeu dangereux.

« Ce repas n’est pas pour vous. » Ta langue claque contre ton palais. Te redressant, tu viens imiter son geste - comme si tu souhaitais t’imposer de ta carrure frêle, ta propre lame rejoignant la sienne dans le bois innocent du petit meuble. Chaque pas est félin, tes yeux brillants le sondant sans dévier un seul instant. « Mon très cher Orion n’est pas asservi, je l’aurais su depuis le premier jour autrement. Vous me prenez vraiment pour une idiote. Et je déteste ça. »

Repoussant le plateau du bout des doigts, comme pour lui en interdire l’accès, tu veux le forcer à focaliser son attention sur toi. Ta silhouette vient le bousculer, tes doigts se levant pour venir attraper sa mâchoire et le détailler sous plusieurs angles.

« Quel genre de jeu ? Vous avez une idée derrière la tête, Monsieur sans Nom ? Je suis infatigable, insatiable et immortelle, et les jeux dangereux sont ma spécialité. Vous devriez rebrousser chemin, je risque de vous malmener un peu trop sinon. »

Et tu ris encore, tes ongles venant griffer le derme de son visage alors que tu oses attraper le couteau du plateau pour récupérer une bouchée de nourriture et la dévorer, sans jamais défaire ton regard du sien.

Jamais tu n'as envie de lever le mystère concernant ta pauvre personne. Tu veux la faire perdre patience, tourner en bourrique, tu ne veux pas qu'elle apprenne à te connaître et tu préfères te cacher derrière cette identité ; tu y tiens fermement, quand bien même la doctoresse ne semble pas être convaincue de la véracité de ton nom. Ce que tu n'aimes pas, c'est qu'elle te retienne autant et qu'elle te prive de repas.

Ta langue claque avec fureur et tu laisses enfin tomber le masque, le voile couvrant toujours ta chevelure comme elle le peut. En un mouvement un peu trop brusque, il s'envolera et dévoilera tes cheveux bruns. En attendant, tu te contentes de sourire, tirant la langue pour espérer la dégoûter si elle atteint ses doigts qui t'enferment.

« Vous ne mangez rien, vous l'avez dit tout à l'heure. »

Et tu veux l'aider à finir ce repas de roi. De gré ou de force. Tu sembles tout à coup plus attiré par la personne que par ses biens, tes pupilles se rétractant sous la nouvelle. Une immortelle, rien que ça. Tu claques immédiatement tes dents entre elles, vif, violent jusqu'à ce qu'une main ne vienne attraper son poignet. Tu te tiens prêt à lui briser les os, ternir cette ambiance aseptisée dès qu'elle a fini de te provoquer de sa malheureuse bouchée.

« Immortelle, c'est bien ça ? », tu as bien compris qu'elle a insisté sur ce mot. Et même si tu te prendrais un malin plaisir à lui prouver qu'elle n'est pas réellement immortelle, tu reviens à la charge pour la garder avec toi. « Vous devez m'apprendre ça. »

Ta langue siffle, hume l'air. Tu es tout de suite bien plus sérieux, moins joueur. Mourir de vieillesse n'est pas dans tes projets et tu voudrais profiter de l'éternité pour pouvoir étreindre le monde petit à petit. Tu l'éloignes de ce maudit plateau, les yeux rivés sur elle pour finalement la poser dans son lit et y glisser à ton tour pour l'ensevelir sous ton corps massif.

« Je ne repartirai pas sans cette connaissance. Et si je dois vous tuer pour m'emparer de votre petit secret, je n'hésiterai pas. Alors vous feriez mieux d'arrêter de jouer et de passer aux choses sérieuses. » Une main glisse contre sa gorge, tu la menaces d'attaquer au moindre cri de détresse. « Je veux. Tout. Savoir. Immédiatement. Vous rendrez service au monde entier, puisqu'avec l'immortalité, je nettoierai le monde de ses déchets. »

L’ambiance change, le premier rôle change encore de protagoniste alors que l’homme reprend le dessus sur toi. Sa main entoure son poignet avec une facilité presque déconcertante ; tu n’as même pas le temps de te débattre que tu sens le matelas du lit contre ton dos. Tu grondes, les traits de ton faciès si fermé se montrant étrangement expressifs le temps d’un instant. Tu as visiblement une corde sensible et il te faut un certain temps avant de récupérer ton expression mesquine. « En plus de n’avoir aucune identité, vous voilà sourd. » Les provocations ne cessent pas alors que ces ordres ne sont à tes yeux qu’une mélodie disgracieuse.

Le lit grince sous son poids, et prisonnière de sa silhouette imposante tu ne dis rien. Ton pouls bat contre sa main, ferme, et tu comprends à son regard qu’il n’hésitera pas. Loin de toi l’idée de crier ; tu n’as besoin de personne pour sortir de cette situation. Par contre, tu ne comptes pas arrêter de malmener le pauvre homme en quête d’une bénédiction que tu as tant désiré.

« Pensez-vous réellement que je vais offrir l’immortalité au premier inconnu malpoli après toutes les années passer pour l'acquérir ? Tuez-moi et vous n’aurez rien. Pensez-vous qu’une femme de ma stature est assez idiote pour garder des notes lisibles par tous ? » Tu roules des yeux, agacée qu’il te prenne pour une dame de bas étage. « Vous êtes malpoli, sale, goujat et vous pensez mériter ce don divin ? Faites-moi rire. » Et tu jauges encore, de la tête à la queue en échappant cette fois un rire moqueur. « Quel âge avez-vous très cher ? »

Tu te fiches bien de ses ordres, ta main attrapant son poignet pour espérer lui faire lâcher prise. Tes ongles griffent, marquent sa chair en perdant petit à petit patience. Une jambe repousse cette queue reptilienne, dans un grognement frustré. « Lâchez moi, ce n’est pas comme ça qu’on traite une femme de mon rang. »

Tu te fiches bien d'accélérer les choses, de brûler les étapes. Elle vient de toucher une corde sensible et tu es tout de suite plus intéressé à l'idée qu'elle t'enseigne tout ça. Tu n'as qu'une envie : faire partie toi aussi de ces gens dont le temps n'efface pas les traces. Tes yeux sont verrouillés sur elle, tu l'analyses, tes lèvres fines se serrant à mesure que tu continues ton exploration.

Rapidement, ta queue prend toute la place dans le lit. Tu l'entoures comme si tu voudrais la piéger dans un étau, prêt à serrer, prêt à la faire craquer pour qu'elle ne puisse définitivement plus bouger. Tes dents claquent et les mèches alourdies par les bijoux tombent de tes épaules, frappant doucement le visage de ta victime du moment.

« Ce n'est pas une demande que je vous fais : c'est un ordre. Vous allez vous ouvrir à moi, m'ouvrir la porte vers l'immortalité pour que je puisse vous rejoindre avant que je ne perde patience. »

Tu finis par siffler, agressif, sauvage. Les draps blancs qui t'habillent font tache face à ton attitude. Tes doigts s'enfoncent dans sa chair encore molle, bien trop jeune pour une personne immortelle. Ça te fascine et tu aimerais toi aussi figer tes traits, faire cesser les crevasses qui définissent tes sillons nasogéniens. Tu veux conserver ta beauté, ce mûrissement qui, au fil des années, risque de fortement s'accélérer si tu ne fais rien pour le ralentir.

« Je vais avoir deux-cents ans. Comprenez mon urgence. »

Mais tu ne vas pas la supplier. Tu la secoues un peu, le sang perlant des plaies qu'elle t'inflige. Pourtant tu ne lâches rien, encore plus mauvais en venant étaler ton sang vicié partout où tu le peux.

« Vous ne pouvez rien faire face à moi. Donnez-moi au moins un indice, je commence à en avoir assez de jouer avec ma nourriture. »

Et la faim peut se lire dans tes yeux. Tu es prêt à planter tes crochets, lui faire regretter toutes ces provocations qui n'auraient jamais dû avoir lieu. Ici, c'est toi le prédateur, tu en es persuadé ; mais la proie est protégée par ses rapaces et cette idée même que tu doives écourter votre rencontre te tend.

« Je ne lâcherai rien. Vous êtes une vilaine, vieille mégère. Une furie qu'on devrait enterrer vivante. Je n'ai aucune pitié, encore moins pour les éléments remplaçables. »

Plus il se montre impatient, plus tu te renfermes sur toi-même, le regard froid, l’eau de tes yeux de plus en plus mauvais. Si lui a la force, le dessus, de ta stature bien plus lourde et imposante que la tienne, tu as les connaissances. Le savoir, celui qu’il n’a pas. Et qu’il n’aura jamais s’il se décide à te tuer. S’il est en mesure de t’ôter la vie, il ne peut négocier ; tu as les mots de ton côté et tu l’as très bien compris en étirant un sourire amusé.

Mesquin, comme tu en as l’habitude.

« Vous avez encore quatre-vingt belles années devant vous, Orion. Vous ne devriez pas vous montrer si violent envers une grande dame de mon rang. » Tu détestes te répéter. « Ni si pressé envers la Grande Doctoresse d’Arvandor. Qui sait ce qui pourrait vous arriver ? » Ton sourire s’élargit, alors que tes ongles se plantent un peu plus fermement dans sa chair. Ses insultes ont le don de t’agacer, tu siffles même les dents serrés en sentant chaque trait de ton visage se fermer en une mine vexée et hautaine.

« Si je suis si remplaçable que ça, alors pourquoi me supplier de vous offrir ce que vous semblez chercher depuis des années ? » Tu plantes tes ongles autant que possible dans son poignet, avant de finalement lâcher l’affaire pour l’empoigner de nouveau et tenter de le forcer à lâcher prise. « Si vous me tuez, vous n’obtiendrez jamais ce que vous souhaitez, alors soyez un gentil garçon Orion. Je n’offre mon savoir qu’aux hommes bien élevés, et dignes d’être considérés comme mes élèves. »

Ce qui n’est pas son cas.
Pas pour l’instant.

« Et les goujats ne méritent pas le don des dieux. »

Lentement, tu passes un doigt contre sa chair bien trop jeune pour une personne aigrie par la vie comme ça. Ses menaces ne semblent pas t'atteindre en surface, dépravé comme tu peux l'être, ignorant royalement les conséquences de tes actes que tu penses mesurés pour donner un sens à la vie qui t'entoure. Tu as bien conscience de son sang et de son titre, et ça te fait sourire davantage quand tes anneaux se resserrent autour de sa maigre personne.

« Je trouverai l'immortalité avec ou sans vous ; vous n'êtes qu'un tremplin pour m'aider à aller plus vite, c'est tout. »

Le duel de forces devrait être gagné d'avance. Tu pousses de tout ton poids, grattant jusqu'à brûler sa peau à travers tes gants à défaut de pouvoir y mettre les ongles, le regard planté dans le sien en dévoilant tes crochets brillants.

« Mais comprenez que, grande doctoresse ou pas, je ne peux pas garder de témoins… »

Tu insistes encore, avant d'être surpris l'espace d'un instant. Un instant qui dure bien trop longtemps pour que tu puisses garder l'ascendant longtemps. Ta prise se desserre et tu siffles immédiatement, étonné de ton moment d'inattention qui pourrait te coûter très cher, trop cher.

« Pimbêche indigne. Vous êtes comme tous les autres, bonne à être dévorée et oubliée dès que vous n'aurez plus rien à offrir aux autres. »

Le contact prolongé t’arrache un rictus de dégoût, mêlé à un frisson d’adrénaline. La situation dure trop longtemps, au point où tu commences à perdre patience. Ne comprend-il pas qu’en se montrant docile, tu seras plus à même de répondre à ses attentes ? « L’immortalité ne se trouve pas aussi facilement, surtout lorsqu’on est sot comme vous. » Et tu te perds même de souffler du nez pour accompagner ta délicate insulte, fière de ta supériorité face à lui ; tu ne te sens pas en danger malgré ses doigts serrant sa chair et ses crocs te menaçant. Il n’est pas assez stupide pour se défaire d’une personne capable de lui offrir ce qu’il mettra encore des années à chercher.

Tu pourrais jouer le jeu encore un moment, mais tu ne comprends pas le laisser dicter vos positions plus longtemps. Profitant de son inattention, tu viens le repousser aussi fortement que ton maigre corps peut te le permettre, au moins pour te dégager de sous son corps et pouvoir te redresser sur ce lit grinçant sous vos poids, le tien plume ; le sien grotesque.

« OUBLIÉE, MOI ?! » Tu éclates de rire, entre la folie et l’amusement en secouant la tête, tes yeux pétillants d’une malice en te rapprochant de lui. « Pensez-vous qu’on pourra oublier facilement celle qui a enfanté du gardien de l’Arbre Millénaire ?! J’ai été choisi par les Dieux qui ont vu en moi quelqu’un digne de ce rôle divin. Que vous êtes drôle, Orion. »

Le bon sens aurait voulu que tu t’échappes loin de lui, pour le repousser loin de toi, mais tu préfères te rapprocher, attraper son visage de ses mains fines pour le forcer à te regarder dans les yeux, sévère. « Je n’offre l’immortalité qu’à ceux qui méritent une place auprès des plus puissants. Je suis une élue des dieux … Mais vous, je n’en suis pas certaine. Prouvez-moi que vous méritez votre place auprès des plus grands. »

Dans un petit mouvement de recul, tu tentes de te défendre, t'attendant au pire venant d'une doctoresse frêle que tu pourrais écraser et étouffer de ton propre poids. Ses provocations glissent sur tes écailles et tu restes imperméable à elles pour le moment, bien trop occupé à te remettre les idées en place pour ne plus reproduire cette erreur. Tu te retrouves affaibli un instant, ton corps vipérin cherchant à remplir la place dans ce lit avant d'essayer de se faufiler sous elle.

Tu n'as qu'une envie : resserrer les anneaux autour de son corps, de sa gorge fragile, la faire faire, la faire s'évanouir et ne plus t'éterniser ici. Tu es un intrus autant dans cet endroit privatisé que dans ce pays tout entier où tu pensais faire fortune. Tu hausses les épaules en tentant de garder ton sang-froid, la langue fusant entre tes lèvres rapidement l'espace d'un instant.

« Ce n'est pas vous qu'on regarde lorsqu'on pense au gardien. Vous n'êtes qu'une ombre parmi tant d'autres. Un nom tout au plus. Vous n'êtes jamais entrée dans les livres d'Histoire, alors que votre enfant… »

Tu insistes. Tu veux qu'elle se sente inutile, oubliée. Immortelle ou pas, tu n'as jamais vu une seule mention de sa personne – ou tu fais exprès d'omettre son existence, comme si son âme ne valait rien. Tu n'aimes pas le contact de ses doigts, les traits tirés par l'ennui, puis par le dégoût ; cette fois-ci, c'est toi qui as perdu l'avantage, tu as l'impression que cette chose aseptisée est en train de te brûler. Tu lui siffles dessus, répandant tes miasmes sans pression en enroulant ta queue autour d'elle petit à petit, sans serrer pour l'instant.

« Je n'ai rien à prouver, grande doctoresse. Les dieux vous oublient et préfèrent se concentrer sur ce qu'il y a de plus important. Quand vous mourrez écrasée entre mes anneaux, personne ne vous pleurera et votre remplaçant vous effacera d'un souffle. »

Finalement, ton sourire s'agrandit. Tu t'accroches aux draps, obligé de bien te remettre dans ce lit à mesure que tu te tortilles pour la piéger.

Ses paroles sont d’une véracité sans nom. Tu n’es rien au fond, qu’une folle zélée, une obsédée malade, déterminée à être importante, à le devenir et le rester. Ton rire se change en un rictus dégoûté, tes mains si délicates se montrent plus fermes contre son visage ; les ongles griffent, veulent marquer pour se venger. Tu as beau rire, hurler, vociférer, tu ne maîtrises pas la situation. Pas assez, pas totalement. La bête ne bronche pas, ne s’abaisse pas, et ça tu ne veux pas le comprendre. Tu as l’habitude qu’on courbe l’échine, l’habitude qu’on s’abaisse, qu’on te respecte pour qui tu es. Mais lui ne le fait pas, il te tient tête.

Ça te fascine autant que ça te rend folle.

« Vous êtes juste complètement sot. Je suis une figure emblématique d’Arvandor depuis des décennies. Et mon enfant me doit la vie, le respect, il me doit tout. Sans moi, il n’est rien. » Tu vomis ces paroles avec un mépris certain. Oui, pour toi il n’est qu’un ignorant incapable de regarder entre chose que son nombril - culotté de ta part.

Tu sens sa queue s’enrouler autour de toi, de ta taille, serpentine contre laquelle tu ne fais rien. Ton regard ne le lâche pas, hautaine, mauvaise au possible en le jaugeant d’un air mesquin. « Vous ne prendrez pas le risque de me tuer, je vous l’ai déjà dis non ? Vous y perdez au change. Et ne vous en faites pas, si je venais à perdre la vie, autrement que par vos menaces futiles, mon remplaçant saura faire perdurer ma mémoire. »

Tu échappes un rire léger, pour tenter de chasser la colère et le dégoût. Tu joues même l’ennui, t’azur de tes yeux se posant parfois sur la porte, comme si quelqu’un allait revenir te sortir de cet enfer ennuyeux. Te laissant presque retomber dans le lit, tu t’étales, lascive dans une énième provocation.

« Qu’attendez-vous donc pour me tuer ? M’écraser ? Ou m’égorger ? Vous avez tant que possibilités, mais vous n’arrivez pas à en saisir une. Ou alors vous préférez déclarer forfait ? »

Dès qu'assez d'anneaux auront saisi son grand corps maigre, tu pourras lui faire tout ce dont tu as envie. Tu la fixes avec de grands yeux brillants, l'air prédateur en dévoilant les grands crochets blancs qui pourraient, en quelques secondes, venir se loger sous sa chair pour lui faire du mal. Tu sembles avoir compris son point faible et même si tu pourrais jouer avec un long moment, tu te dis rapidement qu'il est temps de calmer le jeu pour ne pas être entouré de cinq gardes qui pourront te neutraliser en un instant.

« Je me fiche de votre mort ou non. L'immortalité viendra à moi en temps voulu, en attendant je peux vous martyriser comme bon me semble et vous rappeler à quel point vous n'êtes qu'un grain de sable sur la plage. Au mieux un insecte qu'on écrase car il est nuisible. »

Tu l'observes qui semble presque se laisser faire et accepter son destin, ne gardant pas son regard dans un coin de ta tête. À l'instant même où tu es assez enroulé autour d'elle, tu viens t'écraser sur elle en serrant petit à petit ta prise. Si sa peau semble peu marquer au début, peut-être qu'à force, elle ressentira l'inconfort de se retrouver dans le piège constricteur.

« J'apprécie voir la vie quitter très lentement le corps de mes victimes, madame. J'en oublie déjà votre entière identité tellement vous n'intéressez personne… Qu'est-ce que ça fait, de savoir que son fils vous a tout volé ? »

Ton corps épouse le sien, tu ne dis rien de plus avant de venir dégager ses cheveux pour lui lécher le cou en réponse à sa récente pose lascive. Que cherche-t-elle à provoquer chez toi ainsi ? Et quand bien même tu sembles réceptif, tu n'iras probablement jamais bien loin car tu l'auras tuée ou on t'aura forcé d'arrêter de serrer l'étau autour d'elle. Aucune issue ne semble t'être favorable, mais pour l'instant, tu t'amuses avec elle en grattant l'épiderme du bout des crochets.

« Je vous conseille de réagir. »

Tu sens ses anneaux serrer leur prise, ton corps pris au piège dans sa queue serpentine. Lascive dans les draps, tu te contentes de rester provocatrice, le regard vicieux, pétillant d’une envie de le mettre au défi ; s’il parle, tu ne le vois pas grandement agir malgré la pression effectuée contre ta chair. « Vous n’avez aucune délicatesse envers les femmes, Orion. Vous êtes terriblement mal élevé. »

Tu ne veux pas montrer ton inconfort ; tu ne veux pas lui donner cet honneur. Alors tu te fais violence pour rester stoïque, la tête jetée en arrière pour laisser ses lèvres glisser contre ton derme, sa langue laper sa peau à t’en arracher un frisson. D’un coup d’oeil tu surveilles la porte de ta chambre, la lumière du couloir ne semble pas couper, Amaury n’est probablement pas derrière mais tu te doutes qu’il n’est pas loin ; il ne l’est jamais quand il est là, avec toi, sans que le médecin en chef ne soit là à tes côtés.

« Si je ne réagis pas, qu’allez-vous faire ? Me dévorer en un seul morceau ? »

Tu ris doucement, une main osant s’aventurer dans ses cheveux, jouant avec les bijoux y étant attachés, avant de se perdre avec plus de ferveur. Tu veux voir jusqu’où il ira, jusqu’où il osera répondre à tes provocations. Tes doigts s'emmêlent, tu serres ta poigne pour attraper plusieurs mèches fermement et le forcer à se redresser pour chercher son regard.

Le tien toujours froid.
Malgré la douleur de ton corps.
Malgré ta respiration difficile.

« Qu’attendez-vous de moi ? Je ne suis pas folle, je vois bien l’effet que je vous fais. Je vous plais ? Vous oseriez vous laisser tenter par une vieille mégère ? » Tu pouffes de rire en venant griffer ses écailles de ta main libre, la voix chantante. « Prenez donc une décision, mais je vous serais gré de bien vouloir desserrer votre prise si vous ne voulez pas que j’appelle mes hommes. »

Il n'y a rien de bon qui puisse ressortir de votre conversation, encore moins de votre rencontre. Tu la sens provocatrice, tu sens qu'elle cherche à tester les limites de ta folie. La seule chose que tu crains actuellement, c'est d'être encerclé d'une dizaine de gardes, rien de plus. Un simple ordre de la grande doctoresse te mettrait sérieusement dans la merde, alors tu te dis qu'en finir avec elle assez rapidement pour qu'aucun son ne sorte de sa bouche te permettrait d'avoir assez de temps pour disparaître. Cela dit, tu risquerais de ne plus jamais pouvoir mettre les écailles dans ce pays.

« Ce serait très tentant de vous dévorer en un seul morceau, mais vous êtes encore un peu grande pour ma bouche. »

Mais si tu dois t'y reprendre à plusieurs fois, peut-être que tu y parviendras. Tu la laisses faire un instant, n'aimant pas particulièrement la sensation de sa main dans tes cheveux, plissant simplement les yeux en attendant un changement d'attitude soudain chez la femme.

Et ça ne tarde pas à arriver. Tu fixes ton regard dans le sien, ton vert glaçant probablement autant que son bleu qui, finalement, semble à peine te faire de l'effet. Tu es plus occupé à rêvasser à l'imaginer se débattre sous tes anneaux resserrés autour d'elle alors que l'air ne parvient pas à entrer ou sortir de ses poumons. Tu hausses à peine un sourcil, amusé de sa question pour finalement la maintenir, une main glissant contre sa peau frêle, tirant sur les tissus délicats tandis que ta prise descend lentement pour te laisser la place de la découvrir sans réellement lui laisser un peu de répit.

« Vous me tentez à la luxure, qu'est-ce qui vous arrive ? C'est la première fois que vous croisez un naga d'aussi près ? »

Tu vas la laisser languir un certain moment. Tu ne dis rien, tu ne fais rien, hésitant un long moment à répondre à ses provocations. Tu te contentes de jouer avec les limites de la décence, tirant finalement sèchement sur ce qui la dissimule, écartant les fibres dans un bruit qui ne dit rien de bon.

« Vous souhaitez tenter l'expérience. Quelle vilaine mégère vous faites. Vous cachez bien votre jeu. »

Le bassin collé au sien, le bas du corps enroulé autour d'elle, tu pourrais simplement lui donner une bonne leçon en faisant d'elle ton petit objet. Mais tu te contentes de siffler, agressif pour finalement l'empoigner fermement et dévorer ses lèvres dans un élan de curiosité. Tu as envie de te lâcher, quitte à lui faire du mal en riant contre elle en te fichant bien d'avoir potentiellement mal interprété ses avances.

En cas d'urgence, tu disparaîtras dans les ombres.