Au coeur des quartiers nobles de Fang, une ombre furtive se déplaçait de jardins en jardins . Dans la végétation, ses petits sabots seraient bien moins bruyants que sur les pavés et les pierres précieuses jonchant les sols de ce ghetto doré. Les oreilles de Zéi étaient à l'affut. Afin d'avoir la plus grande liberté de mouvement, il ne portait que son pagne, même si son kimono était rangé dans son sac. Il le remettrait quand il retournerait au quartier des artisans. Il se cacha quand deux femmes nobles passèrent en discutant suivies de serviteurs prêts à répondre au moindre caprice. Elles parlaient de résidents qui se plaignaient des déchets qui étaient fouillés et peu de chances que ça soit un animal. Et si c'était un gueux. Elles prirent des airs outrés du fait de savoir qu'une telle chose serait possible. En oubliant bien sûr les serviteurs qui étaient loin de rouler sur l'or.

En parlant de serviteurs, le ventre de Zéi gargouilla. Pas de doutes, il était l'heure d'aller manger. Il remit son kimono, bien que le laissant ouvert et se dirigea vers une demeure en particulier. Un agréable parfum se faisait sentir depuis les cuisines. Il remarqua qu'on l'attendait déjà. Un homme borgne aux cheveux noirs attachés en queue de cheval fit un signe au Beasthach. Il était originaire d'Al'Malaq. Zéi se dirigea vers lui et le salua. Un cluasan rejoignit l'humain malaqii.

- Tu as de la chance, aujourd'hui notre employeur n'est pas là à la journée, il est à une réception.


Une excellente nouvelle effectivement. Zéi pourrait prendre son temps pour son déjeuner. Et il n'était pas le seul. Les deux domestiques n'allaient pas être sollicités par leur employeur pour tout et n'importe quoi. Puis pour une fois que la réception se faisait ailleurs. Car Zéi avait déjà entendu des deux hommes qu'ils étaient parfois obligés de rester sans bouger comme des éléments de décor. Un moyen pour le maître des lieux d'étaler ses richesses.

- Enfin, au moins, pas de réceptions où vous devez les regarder se goinfrer en faisant les piquets !

Une fois installés autour de la table de la cuisine, ils attaquèrent le repas. Au menu, du riz, quelques légumineuses et des oeufs durs. C'était l'inconvénient quand le maître n'était pas là, il n'y avait pas de restes de repas à consommer. Car d'après les deux domestiques, s'ils osaient se servir dans les réserves de mets plus prestigieux en dehors des restes, ils risquaient une baisse de leur salaire ou d'être virés. Zéi avait un peu du mal à se soumettre aux nobles, mais il était conscient également que tout le monde n'avait pas cette force.

- Alors tu as réussi à trouver des trucs ?
- Un bracelet tordu avec quelques pierres précieuses. J'ai aussi un peigne plaqué or où il manque quelques dents... Ils jettent vraiment n'importe quoi !


Zéi sorti de son sac une petite bourse et la tendit aux deux serviteurs.

- Au fait, c'est pour ce que vous deviez jeter l'autre jour ! Avec un supplément. En même temps, vu que vous m'offrez le repas.
- C'est normal. Je viens d'Al'Malaq et ça me fait du bien de voir quelqu'un qui soit pas totalement pourri par l'esprit égoïste de Xing.
- Mes parents étaient de Cerah.

Une fois le repas terminé, Zéi jugea qu'il était temps de partir. Il salua les deux hommes et repris sa route. Il passa son début d'après-midi à chercher encore un peu dans les ordures, il trouva un plat gondolé. Puis il quitta le ghetto fortifié noble pour retourner dans les hauts quartiers avec ses trouvailles. Le Beasthach se faufila entre les passants. Il retournerait au quartier des artisans quand il aurait terminé de nettoyer ses trouvailles.

Plus il montait à la surface, plus les habitations se faisaient précaires. Les mendiants étaient nombreux. Les enfants étaient en cours à cette heure-ci. Même si cela n'empêchait pas Zéi d'en croiser qui avaient décidé de sécher les cours pour traîner dans la rue. Après tout, ils avaient peu de chance d'avoir un bel avenir dans ce cloaque puant.

Le beasthach parvint enfin chez lui. Il avait réussi à trouver une petite cavité naturelle dans la roche. Au moins, il ne serait pas en proie aux incendies avec ça. Celle-ci était suffisante pour une personne seule. Cet endroit contenait le minimum pour vivre. Au centre, trônait un hamac avec une couverture usée et rapiécée. Un petit coffre lui permettait de ranger ses vêtements et ses affaires. Un fil avait été accroché sur la largeur de la cavité pour y accrocher le linge quand il était nécessaire de le faire sécher. Un des rares avantages de la chaleur qui donnait dans les hauts quartiers était que ce processus était plus rapide. Mais bon cela ne justifiait pas le fait de vivre dans un trou à rats. Zéi se mit en pagne, retira les bandages à ses bras et ses jambes, ainsi que son foulard. Puis il s'attela à rincer et nettoyer les objets qu'il avait récupéré avec une petite bassine d'eau. Une fois ceux-ci propres, le beasthach s'accorda une sieste le temps qu'ils sèchent. Au moins, il pouvait faire les choses à son rythme.

A la mine, il avait été obligé de suivre des cadences imposées. Il était bien content d'avoir quitté cet endroit. Même s'il avait une certaine amertume en pensant à son frère. Il réalisa alors qu'il n'avait pas fait quelque chose en allant au quartier noble le matin. Aller insulter le propriétaire de la mine sur le mur de sa demeure. Et il précisait régulièrement aux serviteurs de ne pas se tuer à la tâche. Pas sûr que ça marche, mais ça lui donnait moins mauvaise conscience. Car il savait que ça ne serait pas ce parasite qui irait faire ça lui-même. Enfin, il le ferait le lendemain au pire. Jisheng Chong était un humain Aldani des plus ordinaires. Un noble évoluant dans l'opulence caractéristique à ce que Zéi voyait comme un parasites.

Après une petite sieste, Zéi s'habilla de son kimono et d'un pantalon ample et prit le chemin du quartier des artisans muni de son sac rempli de ses trouvailles. Il allait trouver quelqu'un qui pourrait reprendre ces objets à bon prix. Au pire, si on le roulait, il irait se servir dans sa bourse. Même s'il n'était pas un adepte du chacun pour soi, il fallait bien qu'il s'adapte malgré lui. Puis que les gens qui prônaient sans cesse la loi du plus fort ne viennent pas pleurer après.

Il était temps pour la gazelle de Thomson de commencer sa tournée des artisans qu'il connaissait pour racheter ses trouvailles. Ils étaient bien contents d'avoir des matériaux en plus pour leur travail. Surtout ceux proches des hauts quartiers, plus modestes. Pendant ce temps, il se permettait de ronchonner à propos de Jisheng Chong, le propriétaire de la mine où son père et son frère avaient perdu la vie. Tout ça parce que ce type n'avait pas voulu écouter ses ouvriers et n'avait rien fait pour dédommager les familles. Puis il n'avait rien eu pour le punir de sa négligence. Au détour d'une ruelle moins fréquentée, il se permit de jurer.

- Tsss... Un jour ce salopard de noble le paiera !

Au cœur de cette ruelle pas des plus famées du quartier artisanal à la frontière avec le mouroir qu’était les hauteurs de Fang, Zéi soupira après avoir pesté contre cette ordure. Peut-être qu’il ferait mieux de penser à autre chose et quitter cet endroit. Après tout, il allait pouvoir potentiellement se faire un peu d’argent qui lui permettrait de faire grossir sa cagnotte pour enfin quitter ce trou puant. La question suivante allait-être de trouver un artisan capable de le payer à une somme jugée acceptable par le beasthach. Autrement, si on avait l’outrecuidance de le roule, une bourse risquerait de disparaître. Et bon courage pour rattraper une gazelle de Thomson.

Une voix se fit entendre et fit tressaillir Zéi qui se mit en alerte. Elle lui disait que la richesse des nobles en faisait de parfaits instruments qui pouvaient-être usés de manière judicieuse à qui savait le faire. Le beasthach cherchait d’où venait la voix qui l’avait interpelé et c’était dos à lui. Puis il se retourna pour voir une jeune femme se poser avec délicatesse devant lui. Elle fit ses salutations au roublard.

- Euh… Bonjour, en quoi je peux te dépanner. Tu as de quoi payer ?

Zéi l’ignorait. En tout cas, elle avait l’air plutôt soignée, sa tenue était assez ample et lui donnait un côté léger et aérien.

- Et pour les nobles, justement, je me sers chez eux vu qu’ils sont pleins aux as.

Peut-être que la demoiselle n’avait pas tort. Elle semblait s’y connaître dans le domaine. Mais qui disait manipulatrice, disait risques de se faire manipuler soi-même. Cependant, le jeu pourrait sans doutes valoir la chandelle. Puis Zéi était relativement pauvre et avait bien caché sa cagnotte.

- Enfin, mon objectif et de faire payer à un noble en particulier propriétaire d’une mine. Il a refusé d’écouter ses ouvriers et plusieurs sont morts. On a eu aucun dédommagement et ce type s’en est sorti uniquement avec une tape sur les doigts alors qu’on a tous perdu un proche dans cette histoire.

La justice avait été bien trop clémente avec ce propriétaire de mine qui avait été bien trop négligeant au point de faire les mêmes erreurs. Zéi commençait à croire que la justice était plus que complaisante avec les plus fortunés. Mais les petits criminels, quand ils se faisaient pincer, ils risquaient bien plus gros. Une véritable justice à deux vitesses. Après tout, les juges avaient des chances de venir du même monde que la noblesse ou en être proche.

- Mais bon, avant ça, il faudrait que je trouve un artisan à qui vendre ce que j’ai récupéré qui puisse me payer correctement. Si tu m’aides déjà pour ça, je t’en en donnerai une part de ce que j’ai gagné.

Zéi estimait que ce qu’il avait récupéré allait environ coûter une vingtaine de liges. Il indiqua cette somme à sa partenaire improvisée.

- Au fait, moi c’est Zéi. Et toi ?

- J’ai plus de famille… M’enfin…

Car derrière cette haine des nobles se cachait également une peine, celle d’avoir perdu des gens qu’il aimait à cause de la négligence. Mais bon, visiblement, la dame ne semblait pas vraiment sensible à ça.

- Je veux juste me venger de ce salopard avant de quitter ce maudit trou !

En ce qui concernait l’argent, si Zéi en avait besoin, c’était pour payer une place dans une caravane qui allait en direction d’autres endroits d’Arathia. Mais pour cela, il fallait traverser ce maudit désert. Le faire en solitaire était un risque de se perdre, être un potentiel gibier pour la rare faune locale, ainsi que les bandits qui le peuplaient. Et on ne pouvait pas vraiment dire que Zéi était un pro de la bagarre. Sa spécialité était d’avantage la fuite. Mais cela n’était pas un handicap quand on était un chiffonnier et un voleur qui devait pouvoir se dérober rapidement et qui était conscient qu’il ne faisait pas le poids en cas de combat contre les autorités. La fuite était sans doute une bien meilleure option.

Concernant les artisans, Zéi parlait surtout de ceux qui payaient une misère alors qu’ils avaient bien assez pour payer des hommes de main pour effrayer ceux qui refuseraient de se faire rouler. D’autres étaient honnêtes, mais ces derniers temps, Zéi avait eu l’impression de se faire rouler plusieurs fois.

- Vous devez savoir qu’ici, se tirer dans les pattes c’est un peu la spécialité du coin. Disons que j’ai eu des soucis avec des revendeurs d’objets perdus ou à recycler. Ils te payent une misère quand tu leur ramène de l’or, mais ils ont assez pour se payer des hommes de main pour faire peur à ceux qui voudraient contester la chose. Et quand je vois les prix qu’ils proposent parfois en boutique qui sont complètement indécents.

C'était le souci avec les revendeurs, surtout ceux qui étaient proches des hauts quartiers.

- Et j’avoue que j’aimerais tenter de faire directement affaire avec des artisans. Je sais bien que tous ne roulent pas sur l’or, mais bon, tant qu’ils ne cherchent pas à me rouler. J'ai déjà eu le cas avec certains qui étaient toujours mieux lotis que nous autres dans les hauts quartiers. Justement, peut-être que l’un d’eux peut-être prêt à racheter les objets à un prix qui puisse satisfaire tout le monde et il n’aura pas à passer par de revendeurs. Puis au pire, je me paye moi-même !

Zéi ne niait pas que certains artisans soient assez pauvres. Il avait d’avantage une dent contre des revendeurs peu scrupuleux qui se faisaient une marge énorme. Il était ainsi normal que le beasthach veuille se rémunérer plus décemment. Mais certains artisans étaient également dans des cas similaires. Surtout ceux appartenant à la classe moyenne. Car la plupart des chefs de grosses organisations mafieuses côtoyaient d'avantage la noblesse que les petites frappes des hauts quartiers qui servaient d'avantage de chair à canon pour les sales besognes, en évitant aux gros bonnets de directement se salir les mains, et surtout de risquer leur vie.

- Sinon enchanté l’Evanescente.

Car Zéi devait prendre en compte que dans les quartiers des artisans, il y a avait certes, la classe moyenne qui s’en sortait pas trop mal, mais aussi pas mal de gens qui peinaient à joindre les deux bouts. Le nom l’Evanescente lui disait vaguement quelque chose. Il en avait entendu parler une fois de la bouche des deux domestiques avec qui il avait l’habitude de déjeuner en milieu de journée quand leur employeur était absent. Ce dernier était un amateur de divers spectacles vivants, notamment de la danse. En revanche, il ignorait si le propriétaire de la mine connaissait l’Evanescente. Enfin ses passions. La plupart du temps, il se contentait juste de décorer sa maison, pas d’étudier d’avantage son quotidien. Enfin, il n’y avait jamais pensé. Mais il y avait de quoi trouver de vilaines choses sous cet angle. Et cette femme pourrait sans doutes lui être utile.

- Maintenant que j'y pense, j'ai déjà entendu ce nom quelque part...

En vérité, Zéi n’avait jamais vraiment vu de spectacles de danse, ils étaient assez rares dans les auberges les plus pauvres. Non, là-bas, c’était d’avantage les bagarres et les racontars d’ivrognes ou de voyageurs qui rythmaient les soirées dans ces lieux. Parfois, quelques danseurs et musiciens pauvres venaient faire un concert. Mais ils étaient assez rares. Et comme partout, il était difficile de se faire connaître et de monter en grade. Zéi n’y croyait plus pour sa part. C’était pour cela qu’il volait les nobles pour quitter ce trou et trouver un endroit qui lui permettrait de prendre un nouveau départ et de tourner la page. Mais pour le moment, il était bloqué ici, avec toutes rancunes et ses vieux démons.
A la question au sujet des objets à vendre, Zéi lui parla de ses trouvailles du jour qui avaient été nettoyées en amont.

- J’ai un bracelet tordu en argent avec des pierres précieuses. Un peigne plaqué or avec quelques dents manquantes et un plat plaqué or gondolé. Tsss… Les nobles jettent vraiment n’importe quoi ! Donc si tu connais des gens qui pourraient être intéressés par le rachat de ces objets pour les recycler. Je pense qu’ils seraient bien contents d’avoir des matériaux.

L’homme-bête ouvrit son sac et montra les objets qu’il contenait. Ce n’était pas sa meilleure journée en termes de résultats, mais pas la pire non plus. Il pouvait également compter sur ses deux camarades du quartier noble pour lui donner des objets dont leur employeur ne voulait plus. Et même si se tirer dans les pattes semblait-être le genre de la maison, cela n’avait pas effacé pour autant toute forme de solidarité. Et si Zéi n’hésitait pas à voler ceux qui osaient se moquer de lui, en revanche ceux qui l’aidaient, il n’hésitait pas à leur rendre. Ainsi, pour tous les repas fournis et les objets donnés, Zéi donnait une grande part de ce qu’il avait récupéré en revendant ces objets aux deux hommes. L’un d’eux venait d’Al’Malaq et rêvait de rentrer au pays, cela allait sans doutes l’aider lui-aussi à faire des économies pour pouvoir enfin payer son ticket de sortie. Voilà ce que cherchaient beaucoup de ceux qui croupissaient dans ce trou, en dehors des nobles, acheter leur précieuse place au sein d’une caravane pour quitter cet enfer.
Concernant le fait de se faire des contacts, là où la demoiselle semblait pas mal côtoyer les artistes, Zéi réfléchissait à d’avantage tisser de liens auprès des divers serviteurs qui devaient assurer les besoins des nobles. Ces derniers étaient des mines d’informations sur les habitudes des parasites, ainsi que de chercher à préserver les objets que Zéi pourrait revendre. Beaucoup d’entre eux n’appréciaient pas spécialement leur condition, bien qu’il y ait pire ailleurs. Devoir assister des gens se comportant comme des enfants gâtés ne donnait pas du tout envie à Zéi. Et dire que ces gens osaient prendre de haut les autres, alors qu’ils ne savaient même pas s’habiller, cuisiner, mettre la table, faire le ménage et la liste était bien longue. Les domestiques déploraient le fait que leur travail consiste à vendre de la paresse.

- Pour ma part, faut que je développe mon réseau parmi les domestiques. En plus des artisans. Ils connaissent bien les emplois du temps des nobles, ainsi que tous leurs vilains secrets.

Zéi en revint aux objets qu’il comptait revendre.

- Bref, revenons à nos objets. En général, je fais en sorte d’être un peu en dessous de ceux qui vendent la matière première aux artisans, ainsi que les revendeurs. J’ai bossé à la mine, et nos salaires n’étaient pas mirobolants, alors que le proprio se faisait des marges indécentes. J’ai entendu régulièrement des artisans se plaindre des prix élevés de la matière première.

Tant qu’on le payait correctement, Zéi se fichait de ce qu’on faisait de ces objets de récupération. Certains faisaient de l’art abstrait qui le dépassait totalement, mais proche des hauts quartiers, ces genres d’énergumènes se faisaient rares. Il fallait se rapprocher des quartiers nobles, et donc des artisans plus fortunés pour voir ce genre de choses, au vu du fait que ça se vendait potentiellement plus difficilement. Mais il savait que beaucoup d’artisans plus conventionnels aimaient récupérer des objets à recycler car ça valait moins cher. Des pierres précieuses pouvaient-être retravaillées, des métaux fondus, bref, il était possible de les remodeler en de nouveaux objets qui duperaient les acheteurs, se doutant qu’ils étaient potentiellement faits de ce qu’ils avaient jeté la veille.

Zéi avait déjà entendu de quelqu’un que ceux qui avaient tout avaient tendance à ne plus reconnaître la valeur de certains objets jugés comme précieux par d’autres, au point de les jeter comme de vulgaires déchets.

- Personnellement, tant que je suis payé correctement, même si des gens ont des goûts douteux, au moins, ils donnent une seconde vie à ces objets plutôt que des les jeter aux ordures.

Concernant la question des domestiques, si Zéi était d’accord du fait qu’il n’aimait pas servir les nobles, en revanche, il n’appréciait pas vraiment la pointe de mépris de la part de la jeune femme. Même s’il avait eu un conflit avec son frère au sujet d’un travail honnête mais pénible et peu valorisé pour un salaire de misère, il avait tout de même du respect pour ceux qui devaient l’accomplir. Il avait entendu les témoignages de personnes avec qui il mangeait régulièrement, et c’était loin d’être une vie de rêve. Juste, la vie dans les hauts quartiers était tellement peu enviable que certains étaient prêts à tout pour s’en extraire et le travail de domestique en était un parmi d’autres. Car certains nobles logeaient leurs serviteurs directement chez-eux afin de les avoir à disposition.

- Honnêtement, de dire que les domestiques sont méprisables, je peux pas te laisser dire ça. Les travailleurs font juste ce qu’ils peuvent pour s’en sortir. Je suis d’accord que c’est pas terrible de se rabaisser à devoir faire ces jobs de merde pour des gens qui sont même pas capables de cuisiner ou de faire le ménage. M’enfin…

Zéi croisa les bras en soupirant.

- Bref, vous semblez connaître des bijoutiers, pour ma part, ça me convient bien. Ils savent retravailler les pierres. Et pas que pour faire de l’art contemporain.

Pas sûr qu’elle ne devienne un bon contact, enfin, malgré les désaccords, ils allaient aux quartiers des bijoutiers. Zéi se contenta de suivre la jeune femme tout en gardant un air méfiant. Les boutiques étaient assez nombreuses, tout comme les artisans qui façonnaient ces futurs objets qui allaient être achetés par les plus fortunés. Dans les quartiers pauvres, les rares parures étaient essentiellement en matériaux de récupération bon-marchés. Mais Zéi allait dans les poubelles des nobles et trouvait donc des objets de bien meilleure qualité. Pas étonnant qu’il exige d’être mieux payé. Mais porter ces objets dans les quartiers pauvres était la garantie de se les faire voler. En général, se faire remarquer n’était pas une bonne idée. Bien qu’il soit une race peu commune à Xing, Zéi était petit et assez rapide. Et ceux qui avaient voulu le détrousser avaient vu pour la plupart du temps, leur cible fuir à une très grande vitesse. Le Beathach avait tendance à faire divers détours avant d’arriver à destination quand il se sentait menacé afin qu’on ne retrouve pas où il se rendait, notamment son domicile.

Normalement, ils achetaient à des propriétaires de mines, quasiment tous issus de la noblesse. Un peu comme l’ancien employeur de Zéi et de sa famille. Celui qui avait été responsables des décès de son père et de son frère par négligence. Et dire que le travail des ouvriers, puis des artisans finissait aux ordures. Une honte pour Zéi. Il estimait qu’au moins il offrait une seconde vie à tous ces objets.

Tandis qu’il avançait, les oreilles de l’homme-gazelle étaient en alerte.

- Si je pouvais trouver du jade… Il m’en faut absolument pour terminer ce collier…

Une remarque qui n’était pas tombée dans l’oreille d’un sourd. Zéi vit un homme visiblement nerveux. Sans doutes une commande avec un délais limité sans doutes que cet artisan serait prêt à y mettre le prix. Intéressant, mais Zéi comptait faire un tour afin de trouver les meilleures personnes qui y mettraient le prix.

- Vous voulez me ruiner ?! C’est quoi ces prix.
- Eh ma petite dame, c’est la loi du marché !

Une femme se plaignait du fait que les matières premières étaient hors de prix. Car les artisans devaient les acheter avant de pouvoir les transformer en bijoux. Une personne qui se plaignait de ces prix ?! Voilà une cliente potentielle tout aussi intéressante. C’était l’avantage des chiffonniers comme Zéi. Puis ayant travaillé jadis dans les mines, Zéi avait une idée des prix proposés par les propriétaires de celles-ci. Egalement, il s’était assez bien renseigné afin de se rendre plus attractif. Même s’il avait encore beaucoup à apprendre.

Jusqu’à maintenant, il avait détecté deux cibles potentiellement intéressantes pour vendre ses bijoux. Un individu désespéré ayant besoin d’un matériau en particulier pour un besoin urgent, puis une femme qui semblait désabusée par les prix proposés par les mines. Désormais, il serait temps d’entrer en scène et peut-être que la jeune femme qui lui servait de guide pourrait montrer ses talents. Et si cette dernière avait elle-aussi repéré des cibles potentielles, c’était le bon moment.