Avec les nombreux changements qui ont eu lieu dans les hautes sphères politiques de l'empire, mais aussi dans celle de l'armée... Cela m'a pris plus de temps que prévu de recruter tout ceux de confiance pour faire de nombreuses enquêtes internes, mais aussi pour se renseigner sur l'état actuel de l'armée, j'ai donc une montagne de rapport extrêmement précis sur tout ce qui a pu se passer.

Voyons le positif de la situation, cela a pris du temps... Mais j'ai pu trouver quelques branches pourries, j'ai pu avoir un grand nombre de rapports précis ce qui me permet d'avoir une bonne vision sur l'état actuel des choses et sur les manœuvres possibles... Mais il reste un détail à mettre en place, discuter avec l'empereur ! Si j'ai commencé ses enquêtes et ses recherches avant son arrivé, depuis qu'il est pouvoir, il a été décidé qu'on travaillerait ensemble sur les détails.

Alors j'ai un sac rempli de dossier, quelques enquêteurs de confiance avec moi, notamment Thorun et Adenia (fille d'un haut politicien qui se veut neutre). Je me retrouve à attendre qu'on prévienne l'empereur de mon arrivé et de ma demande d'audience, bien qu'une missive a été envoyée plusieurs jours à l'avance. Nous sommes tous deux des hommes occupés et on ne peut pas vraiment se permettre ce genre de longue réunion sur un coup de tête.

- On a trouvé pas mal de chose, mais tu penses vraiment qu'il y a besoin de restructurer l'armée ?

Thorun n'aime pas vraiment ce genre de manœuvre, il aime comment l'armée fonctionne, c'est une seconde famille pour lui... Et même s'il a trouvé beaucoup de problème, il espère toujours que l'armée redeviendra ce qu'elle était...

- Je suis d'accord avec cet idiot de Thorun... C'est peut-être surréagir non ?

Adenia a grandi dans l'armée, son père était militaire avant de prendre sa retraite et toutes sa famille est proche du monde de l'armée... Si Thorun est légèrement réfractaire, Adenia pense qu'il le faut, mais se refuse à l'admettre... De toute façon...

- À mon humble avis, quand un système est perturbé, il vaut mieux faire table rase et repartir avec de bonnes fondations et on est justement sur un moment propice à ce genre de chose... Nouvel empereur, nouvelle alliance, nouvelle menace... Mais je n'ai pas vraiment le pouvoir de faire ce genre de chose, c'est aussi la raison de notre venue ici... Voyons ce que l'empereur a comme idée.

On attend tous les trois, bien aligné, mes deux amis légèrement derrière moi pour respecter l'étiquette de la hiérarchie.

Il était attendu que tout ne soit guère parfait au sein de l'administration impériale entre les transitions de pouvoirs dû au jeu des trônes musicaux, c'était même un fait admis auquel l'on n'y pouvait rien. Toutefois, savoir que la chose était là et dans quelle mesure étaient deux choses très différentes et à dire vrai, la seconde était bien plus cruciale que la première. Les rapports, census et autres documents clés d'enquêtes et d'inspections diverses avaient pris le temps qu'il fallait pour être rassemblés et expédiés au Palais Impérial sur l'ordre express du monarque, l'on avait motivé les archivistes et les scribes avec quelques pécules de tel manière à ce qu'ils fouillent de fonds en combles les arrières salles des centres bureaucratiques, l'on avait dépêché dans l'urgence ci et là des inspecteurs et autres observateurs capables de faire des calculs dépassant quatre chiffres, l'on avait même dû théoriser en usant de logique et d'indices éparses pour reconstituer certaines données, mais in fine, tout ce dont avait besoin le Trône avait en grande majorité finie en son emprise ou tout du moins ce qui ne l'était pas encore arrivait au comptes-gouttes et la finalité serait la même.

Ceci dit, et en dépit des efforts et des attentes, force était de constater que la situation était en réalité plus ennuyeuse, pour rester cordial et ne pas entrer dans des propos disgracieux, que prévu initialement. Beaucoup plus ennuyeuse. De là à dire que l'Empire prenait l'eau de toutes part il n'y avait qu'un pas, quoique c'était sans doutes là une exagération catastrophique dû à des considérations beaucoup trop alarmistes, mais tout de même, à envisager systématiquement le pire l'on voyait déjà où tout cela menait en l'état si le cap était maintenu, et la fin du voyage que l'on percevait au loin n'était guère envieuse.

Perché dans sa salle des Portulans à inspecter les innombrables cartes qu'il avait fait installer ci et là, tout en les mettant en comparaison avec les documents à disposition, l'Empereur d'Al'Malaq fulminait intérieurement en constatant à quel point la brève période de règne de l'Usurpatrice avait été dommageable. Il était assez impressionnant de constater dans qu'elle mesure celle ci avait fait table rase de la plupart des structures établis afin de façonner son gouvernement d'époque de tel manière à ce qu'il soit à sa botte et apte à s'élancer dans des lubies de campagnes militaires digne d'une folie des grandeurs des plus malvenues, et c'était là sans compter tout ceux qui avaient été chassés, rabaissés, dépossédés et ainsi de suite, pas uniquement pour des raisons purement régaliennes visant à se prémunir de coup de surin dans le dos qui plus est, ni plus ni moins qu'une reddition pure et simple face aux émotions, l'une des pires issues possibles dont les conséquences perduraient encore jusque sous le règne de son successeur par ailleurs.

Il y allait avoir du travail, un travail conséquent, pour ne pas dire herculéen. Des ajustements, corrections, consolidations, et ainsi de suite, autant de choses à faire qu'il y avait de tares significatives et potentiellement nuisible à l'ensemble de l'horlogerie impériale qui ne pourrait décemment fonctionner avec des rouages rouillés, endommagés ou encore dysfonctionnel, autant de risques perturbants l'ensemble de la machinerie et son harmonie, et si il y avait bien quelque chose qu'il était impératif de préserver dans toute sa sainteté, c'était l'harmonie de l'administration temporelle. Car sans cela, c'était courir inévitablement vers la catastrophe et affliger le pays de mille et uns maux insidieux qui le rongerait progressivement tel une pestilence au sein des entrailles. Toutefois, identifier les problèmes, situer ces derniers et estimer l'ampleur de ceux ci n'étaient que la première étape, la détection étant faites encore fallait-il trouver des solutions.

Et malheureusement, les remèdes et solutions miracles étaient un mythe, même si un écosystème était pourri en bonne parti, il continuait à fonctionner, à faire tourner l'ensemble et purger purement et simplement le tout pour repartir sur des bases saines n'était guère une solution acceptable ou envisageable même si diablement tentante à bien des égards. Après tout, le monde continuait de tourner et il en allait de même pour le gouvernement et ses dépendances, mettre une halte à ses activités et ses devoirs sous prétexte de restructurer le tout convenablement n'était pas une option, les retombées seraient encore plus désastreuses que de laisser les choses comme tel. Plutôt une machine en état de malfonction mais tournant au ralentis plutôt qu'un néant distordu.

Ceci étant dit, il advient de temps à autres que le destin fait bien les choses et que les grands esprits viennent à se rencontrer, sur le principe, quand à la forme, tout allait dépendre. En tout état de cause, alors que Silebor campait sur ses positions, parcourant census et rapports inlassablement depuis des jours, une requête d'audience particulière vint se présenter à lui par l'intermédiaire des hérauts impériaux en charge de recevoir ces dernières. Point de nobles quelconques, d'illustres parasites ou autres pertes de temps ambulantes, mais une délégation de l'armée emmenée par le Général. Celui ci tombait bien, c'était le cas de le dire, il y avait en effet un certains nombres de choses à traiter quand à l'état actuel de la flotte et des forces armées, et au vue de l'état du monde comme de la stabilité politique inespérée mais temporaire, il était urgent d'attendre à un certains nombres de choses la concernant tant que l'occasion se présentait. Les formes ayant été faites à l'avance, et l'ordre du jour pouvant être changés en fonction des caprices du Trône, son tenant avait purement et simplement décrété que le Général et ses suivants seraient prioritaire à toute audience dès qu'ils se présenteraient, peu importe ce qui était convenu à la base.

<< Faites les entrer céans >>

Commanda-t-il purement et simplement à la garde et au héraut en fonction lorsqu'on lui annoncé qu'il était présent. Le temps était une ressource précieuse, et le fer n'attendrait pas qu'on le batte pour refroidir. Autant faire ce qui devait l'être tant qu'il était chaud pensa le monarque tout en se saisissant de quelques rapports préliminaires en rapport avec l'état des troupes et des vaisseaux de guerre sans pour autant quitter le confort de son siège, parfaitement à l'aise en étant retranché derrière ses montagnes de paperasse et ses mers de cartes. Le héraut annonça la délégation militaire, les dés en étaient maintenant jetés.

Rapidement, on revient nous voir en nous disant d'entrer immédiatement... Au moins, pas d'attente interminable, c'est une bonne chose... On nous annonce et on entre tous les trois, sans attendre, on baisse nos têtes et l'on effectue le salue qui est de mise quand l'on rencontre l'empereur. Si Thorun semble peu à l'aise, il maitrise clairement les bases de l'étiquette, il n'a pas le choix en tant que haut gradé... Il reste en retrait en me laissant m'approcher... L'empereur n'a pas une carrure particulièrement impressionnante, mais il dégage une certaine aura, puis son masque est toujours aussi perturbant. Bien que je ne le montre pas, mon visage restant neutre et froid.

- Nous saluons l'empereur.

Une fois les salutations effectuées, je tends la main vers Adenia, afin qu'elle me donne les différents documents contenant les rapports et résultats d'enquêtes que j'ai lancées dès sa prise de pouvoir et ma nomination en tant que général.

- Je souhaite aller droit au but, j'espère que cela ne dérangera pas sa majesté impériale ?

Je dépose les nombreux documents face à lui, si, je sais que cet homme a un objectif louable et fait un bon souverain, je garde un œil sur lui et tous ses partisans, à la fois par réflexe et par crainte que l'empire se retrouve dans une situation tout aussi désagréable que l'ancienne... N'est-ce pas une bonne occasion de voir ses talents de dirigeant de mes propres yeux ? Même si ce n'est certainement pas ma spécialité, les résultats parleront pour lui.

- Suite à votre montée sur le trône et à l'obtention de mon grade de général, j'ai monté une petite équipe de gens de confiance... Nous avons consigné tout ce que nous pouvions, afin d'avoir une vision d'ensemble sur l'état de l'armée...

Il y a un grand nombre de documents, mais ils sont bien triés et simples à comprendre avec un rapide coup d'œil, de plus, on y retrouve autant des inventaires que des rapports sur les différents problèmes. Je fais un pas en arrière et me place à nouveau correctement, attendant ses réactions... Si la qualité est sûrement présente, il est vrai que ce rapport à pris du temps à arriver, légèrement plus de temps que ce que nous avions prévu, il faut dire que certaines personnes ont tenté de ralentir notre progression...Mais que ma trop grande prudence, je n'ai fait travailler que ceux que je considérais comme étant des gens bons et de confiance. Les pauvres risquent d'avoir encore pas mal de travail quand je sortirais d'ici.

L'actuel Général des forces armées impériales malaqis avait une réputation des plus étoffée et garnie pour ainsi dire et même en ces termes cela relevait de l'euphémisme au bas mot. Mais qu'importe en réalité les exagérations et autres contes de mille et uns exploits que les bardes appréciaient conter dans d'héroïques gestes de son et de danse par monts et par vaux. En l'état, à ce moment précis ce n'était ni la force, ni le talent qui occupait le siège d'honneur sous les projecteurs dans l'esprit de l'Empereur, certes cela demeurait deux données majeures appréciable pour le post, mais avant tout, c'était de convictions et de loyauté à une idée dont l'Empire avait cruellement besoin. Indispensable choses afin de cimenter durablement des fondations déjà bien trop fragilisés au cours des récents troubles. Et l'on ne parlait pas de fidélité à une personne, aussi noble fut-il, mais bien à un concept, à quelque chose d'intangible et d'immortel dont l'unique prise en ce bas monde mortel s'incarnait via quelques éparses symboles dont le Trône était certainement en tête de lice. Un concept extrêmement simple à vrai dire à savoir : L'Empire et ce qui faisait son âme, ses terres mais surtout et avant tout son peuple.

Il était à peu près certains que le Général, le Khan, s'il agréait au moins en partie à celle ci, preuve en était de ses choix d'allégeances récents et ses actions contre l'usurpatrice, ce qui serait plus que suffisant comme acte de foi. De toutes façons ce n'était pas comme si l'on avait l'embarra du choix ou même le temps pour. Du temps l'on n'en avait déjà assez dilapidé à rassembler l'information afin de contempler une vue d'ensemble de l'état du pays. Se montrer pointilleux à ce stade serait contre productif, il convenait de faire avec ce que l'on avait sous la main et de préférence faire vite, et au strict minima passable.

C'était aussi dans ce même raisonnement, que l'on avait allègrement allégé les formes d'usages de toute cette audience afin d'économiser le moindre grain de sable chutant du sablier. En temps normal, nombreux seraient ceux qui se seraient offusqués de la chose que ce soit par pure opportunisme ou simple réaction épidermique, mais l'ère n'avait décidément rien d'anodin et ce n'était pas comme si quiconque allait demander des comptes...

<< Le Trône salut la garde de sa lame fétiche. >>

Rétorqua l'empereur en guise de salutation d'usage de son côté à celles initiés par le Général, marquant officiellement le début de cette... Séance de travail. Car in fine c'était cela qui allait avoir lieu ici et maintenant. De surcroît, les gradés de l'Armée ci présent semblaient dans l'état d'esprit adéquat pour la chose, même si les officiers flanquant le Khan ne s'étaient guère exprimé, il suffisait d'observer un instant les traits des visages. Fermés, solennels et peu expressifs. Bien que certains puisent penser que l'on ne pouvait généralement rien tirer de cela, ce n'était pas totalement vrai. Une simple question d'expérience venant avec l'âge et les passes d'armes administratives. Même contrôlés, le faciès demeurait le miroir de l'âme, fut il authentique ou vicié par le faux. Accompagnés des déclarations, les humbles théories se confirmaient. Bien. Cela serait donc pour le mieux.

<< Ce serait plutôt le contraire qui m'irriterait. Allez donc, parlez sans ombrages ni détours. >>

Invita le monarque, il y aurait à dire. Mais pas maintenant, il convenait de laisser celui qui détenait la vision au plus proche du terrain de convoyer ses observations, pensées et même ses doutes s'il en avait. Surtout ses doutes. Car c'était là ce que l'on recherchait quelque part. Les failles, les petits défauts, les minuscules brèches, tout ce que l'on peut parfois manquer alors qu'elles cachent gouffres béants et abysses aussi noires que la nuit. Et de la noirceur, seuls les Dieux savaient à quel point il y en avait.

Quelques instants seulement et de nouveaux documents viennent se joindre à un champ de bataille administratif déjà en pleine action. Sans se pencher dans les détails et à la lecture en diagonale de quelques passages en évidence l'on pouvait affirmer avec certitude que l'état-major avait déjà entamé des investigations de son côté, diligenté des analyses, commandés des inspections et sans doutes surveillés depuis les ombres quelques piste inquiétantes; Bien. Tout ce qui manquait au panorama impérial à dire vrai, la dernière pièce du Puzzle. D'innombrables colonnes de chiffres jointes à tout autant de pattes de mouches bureaucratiques. La pièce maîtresse sur l'assemblage.

<< La Chancellerie, l'Intendance et les guildes marchandes ont pris bien moins de temps à faire remonter les rapports équivalents que j'avais exigé de ces derniers. >>

Entama l'Empereur d'un ton monocorde tout en commençant à feuilleter quelques documents méticuleusement.

<< Le temps est une denrée précieuse qui fait cruellement défaut ces temps ci... Aussi ces derniers ont assurément fait preuve diligence dans la manoeuvre. Bien plus que l'armée certains murmurent même. >>

Il marqua une pause, laissant l'expression muette de son masque comme seule compagnie le temps de s'arrêter un moment sur un ensemble de données ayant attiré son attention.

<< Pour autant... Vitesse ne rime pas nécessairement avec authenticité... Certains esprits se croyant habile ont cru bon d'altérer certains faits, d'occulter certaines données, de minimiser ce qui n'aurait dû l'être. Oh certains tours étaient en effet habile et très bien pensés pour tromper, mais pas assez. Voyez, la destinée a voulue que je prenne les rênes de ma dynastie ainsi que des affaires de cette dernière il y a bien des lunes, c'était il y a déjà fort longtemps. Assez, sans me vanter, pour me permettre d'affirmer n'être point un sot que l'on peut berner en matière de bureaucratie.>>

Le souverain reposa le rapport et s'empara d'un des siens laissés en évidence sur l'un des abords de l'étude qu'il disposa en évidence à la vue de la délégation militaire.

<< Voici, un inventaire de livraisons de ressources à l'Arsenal. Cela devrait vous être familier étant donné que l'on retrouve son équivalent dans l'un de vos documents ci présents. A ceci près qu'il y a quelques... Menus différences sur ce dernier. Ainsi que sur d'autres même. Le vrai défi n'est pas d'obtenir prestement ces documents, mais d'en obtenir des corrects. Peu m'importe le temps pris ou les méthodes, j'estime les résultats avant tout. Et en l'état, je ne trouve rien à redire à ce que l'Armée présente en ce jour au trône... Contrairement à tout le reste de l'administration qui est infestée de vermines. Comme quoi, choisir avec soin ses collaborateurs est une énième fois démontrée comme étant un élément crucial à la bonne réalisation des tâches. >>

C'était là le lot des coups d'état, il y avait des profiteurs partout qui n'aimaient guère le changement et les parasites étaient toujours diablement tenace.

<< Je pense avoir bien saisi les axes majeurs sous entendus par ces rapports. Pour les meilleurs points... Comme pour les pires. La question qui se pose serait toutefois... Quand est-il de la perception de notre Grand Général et de ses subalternes de confiance ? Et les préconisations, constatations et résolutions qui vont avec cela va de soit. Pas de langue de bois. Parlez franchement et directement, au vue de l'état avancée de pourriture de la charpente de la nation, l'heure n'est plus aux simagrées.>>