M’étonne pas que Jaana veuille les ailes ; j’espère que ça posera pas trop de problème de les prendre, qu’on réveillera pas une malédiction ancienne, qu’un rocher géant nous tombera pas sur la tête… Mon imagination trop fertile lorsqu’il s’agit d’imaginer des emmerdes transpose mes rares lectures à la situation actuelle, et je secoue la tête, retenant un soupir. En m’éloignant, je les entends bouger également, parler, et…

Et du blanc, soudainement, m’éblouit. Ma lance grésille alors que je me protège le visage par réflexe, ou du moins j’ai envie de le faire, j’essaie, sans savoir si je parviens à bouger. Ce sont mes autres sens qui reviennent en premier, après un temps qui semble trop long. Du bruit, des gens, cette odeur à nouveau. Sans l’envie viscérale qui m’avait donné envie de la suivre n’importe ou…

Un regard autour de moi pour comprendre, impossible ; au-dessus, un cheval ailé, des gens tirés dans un… J’ai à peine le temps d’essayer d’esquiver ces trucs roses qui tombent du ciel, j’arrive pas à prévenir Jaana qu’on sait jamais peut-être qu’il faut pas les toucher que le flash blanc est de retour.

Puis le chaud. Le sol, contre mon casque, la terre qui rentre par les interstices. De la terre ? Non. Du sable, plus précisément. Je me redresse, toussant, grognant, cherchant autour de moi des indices. Où je suis, est-ce que…

Marjaana !!

“Jaana ?”

Elle était là avec moi, après tout.

Allez, un effort. Je me redresse, concentre mes pensées, re-matérialise une lance. Nous ne sommes plus dans la tour, nous ne sommes plus surplombés par un poney-papillon. Il y a des maisonnettes en bois. On est dans l’un des enclos entourant une maisonnette en bois, dont l’architecture devrait me dire quelque chose.

“Ben, Jaana ??”, une pause, je devrais utiliser son pseudonyme, je jure entre mes dents. “Sigrun ?”

Une observation. Un instant. Je connais l’endroit… le village des éleveurs. Pardon à la personne dont j’ai piétiné le sable de la cour. Et j’ai un instant de panique, à penser que je suis la seule ici, que ceux qui étaient sous ma responsabilité sont perdus… Certes, ils sont grands ; plus âgés en tout cas, mais ça ne change rien…

Et enfin je la vois ; un soupir de soulagement alors que je me précipite, laissant ma lance disparaître, réajustant son plaid sur ses épaules à défaut de la toucher comme j’aurais brièvement envie.

“Jaana, tu vas bien ? Qu’est-ce qui s’est passé, où sont les autres ?”

Beaucoup de questions… Et je doute qu’elle ait les réponses. Un sourire sous mon casque.

“Désolée, je pense qu’il faudra une autre expédition pour les ailes… ”

Résumé
- Albi avance, mais pas longtemps
- Elle se demande ce qui se passe, sans avoir le temps de faire quoi que ce soit, mais clairement LES PETALES C’EST DANGEREUX
- Puis re-flash blanc, et tête dans la terre, le sable, ah, le village des éleveurs !
- Totalement déboussolée, limite paniquée
- Elle appelle ses trois larrons
- Elle en retrouve qu’une sur les trois et s’inquiète pour elle

Un instant, Ben suit joyeusement Janna à travers la salle, farfouillant avec elle en posant quelques questions simplettes, faisant part de ses observations.

Puis alors qu’il se penche sur un squelette, une tension soudaine, et il se retourne, la main sur la garde.

Albi s’éloigne de son côté. La générale vaque également.



Il n’aime pas cet endroit. Fuir sera compliqué, il ne sait pas où est l'ennemi, et la peau de ses mains colle désagréablement à toutes les surfaces à cause du gel. Il lance un coup d'œil sur Albi. Elle ne fait pas attention à lui. Son imagination ?

Peut-elle vraiment couvrir ses arrières ? Peut-elle se permettre de prendre tant de risques après son moment de faiblesse ?
Il jette un œil autour de lui. Albi n’est pas dans son assiette. Jaanna.. Inutile de compter sur elle. La générale est toujours là ; pas dans le meilleur des états, mais elle s'est montrée bien digne de son rang.
Suffira-t-elle ?

Au prix d’un effort, il interrompt le fil de ses pensées.
Jana continue de farfouiller derrière lui. Son air fatigué est toujours là, mais une lueur d'intérêt pointe derrière l’agacement apparent de son attitude.
Elle ne semble pas si inquiète.
Albi explore prudemment les environs, sur ses gardes, prête à en découdre au besoin. Il pense la voir un court moment son regard s’arrêter sur Jaana, mais peut-être est-ce son examen de la pièce qui veut cela. Malgré la situation, une certaine noblesse se dégage d’elle.

Toutes deux comptent l'une sur l’autre.

Et lui ?

Il se sent en danger, autant ou presque que s’il était seul.
Sa situation n’est en rien similaire à ce qu’il vécut bien des années avant, en compagnie d’Ava et des autres.

“Je peux le vaincre.” “Je suis capable de la tuer.” “Il est dangereux.” “Je veux voir jusqu'où je peux la pousser.”

Depuis quand ces idées sont-elles les premières à lui venir en tête lorsqu’il rencontre un partenaire?
À quel point la pression qui l’accable vient-elle des gens présents avec lui ?


Un flash blanc l’éblouit et il pousse un cri tant d’horreur que de surprise.

Sitôt qu’il voit de nouveau, il sort son arme gauchement, la pointant sur les passants qui le regardent comme s’il était fou.

Son regard se perd alors qu’il examine les environs.

Ce décor ne lui dit rien. La chaleur étouffante lui embrouille déjà le cerveau, et il se sent moins vif.

La générale est là aussi. Victime ? Traîtresse ? Peut-il la vaincre par cette chaleur ?

“Mais c’est quoi c’t'endroit’t’endroit?!”

S'exclame-t-il à l'adresse de la guerrière.

Un autre flash lui coupe tout espoir de réponse. Il fait sombre.

“MONTRE-TOI !”

Il hurle avec véhémence, comme s’il voulait chasser les ténèbres.

Petit à petit, son regard s’habitue à l'obscurité.

"Albi? Ma-.. Janna?"
Pas de réponse.
Personne. Il est en sécurité.

Une pluie lourde accompagnée d’un vent froid porte à ses narines des odeurs de terre humide, et d’herbe grasse aux Sucs capiteux. Un rongeur joufflu détale au cri de l’élémentaire, pour disparaître derrière des stalagmites poussiéreuses.
"Générale? T'est la?"

Personne. Il est en sécurité.
Il se sent idiot à crier comme ça, l’arme levée, sans une âme qui vive aux alentours. Après un moment, il baisse son épée, la main tremblante.
Il ignore où il est.. Et pour le moment, il s’en fiche.


Les lèvres serrées, d’un pas chancelant, il va s’asseoir au fond de la grotte, chassant le rongeur qui détale vers la sortie.
Les yeux fixés sur le rideau d’eau à l'extérieur, il ramène ses jambes à lui, s’adosse contre la paroi, et enfonce sa tête entre ses genoux, laissant échapper un souffle tremblants.

Personne. Il est seul.

Résumé: